Participer à la vie sociale et culturelle est un droit, reconnu notamment par les traités européens et la Charte des droits fondamentaux. Pour les 6 millions de sourds et malentendants qui vivent en France, accéder à la culture reste pourtant, malheureusement, très difficile, sinon impossible. En particulier, beaucoup d’entre eux ne peuvent pas aller au cinéma, sauf lorsque les films projetés sont sous-titrés. Accessoirement ce sous-titrage peut être utile à tous ceux qui ne comprennent pas parfaitement le français parlé – notamment les étrangers.
La situation s’améliore, mais lentement : certes, de plus en plus de films en français sont sous-titrés pour leur sortie en salle (aucun en 2010, 8 en 2011, 51 en 2012, 72 en 2013, 95 en 2014 et 117 en 2015 – soit un peu plus d’un sur trois), mais rares sont les exploitants de cinémas qui projettent cette version quand elle est disponible et ceux qui le font se limitent en général à une ou deux séances par semaine. Dans ce contexte, « Marie Heurtin » de Jean-Pierre Améris fait figure d’exception et c’est pour cette raison que le Prix 2015 lui a été décerné : à sa sortie, ce film a été projeté tous les jours et à toutes les séances, partout en France, dans une version sous-titrée pour les sourds et les malentendants.
Or, à Cannes, c’est bien connu, le cinéma, c’est important… Alors quand on constate année après année qu’étant sourd, on ne peut pas voir tous les films qu’on voudrait, quoi de plus naturel que de penser à créer un « Prix du meilleur film sous-titré pour les sourds et les malentendants » qui y serait décerné tous les ans dans l’espoir de sensibiliser les media et toutes les personnes concernées (professionnels, spectateurs et responsables politiques) à la nécessité de sous-titrer les films en français et de les projeter ainsi. L’ARDDS a maintenant lancé cette initiative, avec le soutien de ses sections régionales, du Bucodes SurdiFrance et d'associations affiliées (ADSMN 59, AIFIC, ALDSM, Audition & Écoute 33, Durd’Oreille 78, Surdi 34 et Surd’Iroise), de l'EFHOH (European Federation of Hard of Hearing People), d’Agir pour l’audition, de CinéST, de la revue « 6 millions de malentendants », de Nice Matin, de la Mairie de Paris 7°, de la Ville de Cannes, de Cannes Cinéma et de Cannes Bel Âge.
L’objectif de ce « Prix du meilleur film sous-titré » étant de promouvoir le sous-titrage des films pour les sourds et les malentendants, il est essentiel de trouver d’autres partenaires encore, tant au niveau local qu’au niveau national, pour soutenir l’initiative et la faire connaître : nous sommes ouverts à toute proposition venant d’associations en rapport avec la surdité, mais aussi d’associations de cinéphiles, des pouvoirs publics, des media, ….
Paul Vecchiali nous a fait le plaisir et l’honneur d’en accepter la présidence. Réalisateur de cinéma et de télévision, mais aussi producteur, critique aux « Cahiers du cinéma » dans les années 60, écrivain, engagé, passionné et éclectique, il est l’un des cinéastes français les plus importants des cinquante dernières années ; il a, dès ses débuts, enthousiasmé François Truffaut qui le considérait comme « le seul héritier de Jean Renoir ». Plusieurs de ses films sont devenus cultes : « Femmes Femmes » (1974), « Change pas de main » (1975), « La Machine » (1977), « Rosa la rose, fille publique » (1985), « Le café des Jules » (1988), … Son cinéma est un cinéma d’auteur, le plus difficile d’accès pour les sourds et les malentendants car à la complexité du film s’ajoute la difficulté de simplement comprendre les dialogues – mais c’est précisément cela qui est intéressant ici.
Paul Vecchiali est aussi un grand admirateur de Danielle Darrieux et du cinéma français des années 30. Il a écrit un ouvrage de référence sur le sujet : « L’Encinéclopédie : Cinéastes français des années 1930 et leur Å“uvre » (tomes 1 et 2, Éditions de l’Å’il, Paris, 2010).
Paul Vecchiali a présenté son film « A vot’ bon cÅ“ur » (2004) à la Quinzaine des réalisateurs, une sélection parallèle du Festival de Cannes. Son film, « Nuits blanches sur la jetée » (2014), une merveille de poésie encensée par la critique, a remporté le prix de la critique indépendante et celui du meilleur réalisateur au Festival International du Film de Locarno - il est prévu de le projeter à Cannes en 2016. Et il vient de terminer son 50ème film, « Le cancre », avec Catherine Deneuve, Mathieu Amalric, Pascal Cervo, Annie Cordy et bien d'autres encore...
Le prix 2015 a été remis à Jean-Pierre Améris le jeudi 14 janvier 2016 à 14h30, à l'Espace Miramar (65 la Croisette, Cannes) ; vous pouvez en savoir plus ici.
Nous vous donnons rendez-vous dans un an : un jury composé de 55 cinéphiles sourds a été constitué, avec pour mission de désigner début 2017 le meilleur film sorti en 2016, en VFST. Vous pouvez prendre connaissance du règlement ici.
Plus d’information : vfst@ardds.org